La Fiscalité de la Micro-production d’énergie Électrique au Brésil
The Taxation of Micro-Electric Solar Power Generation in Brazil
Hugo de Brito Machado Segundo
Titulaire d’un master et d’un doctorat en droit. Avocat à Fortaleza. Membre de l’ICET – Institut d’Études Fiscales du Ceará. Maître de conférences habilité à diriger des recherches au sein de la Faculté de Droit de l’Université Fédérale du Ceará, dont il a coordonné le programme de deuxième et troisième cycle (Master et Doctorat). Professeur de la formation de master du Centre Universitaire Christus. Visiting Scholar de la Wirtschaftuniversität, Vienne (Autriche). E-mail: hugo.segundo@gmail.com.
Raquel Cavalcanti Ramos Machado
Master en droit de l’Université Fédérale du Céara. Docteure en droit tributaire de l’Université de São Paulo. Membre de l’ICET – Institut d’Études Fiscales du Ceará. Maître de conférences habilitée à diriger des recherches au sein de la Faculté de Droit de l’Université Fédérale du Ceará. Visiting Scholar de la Wirtshaftuniversität, Vienne (Autriche). E-mail: raquelramosmachado@gmail.com.
Resumé
La micro-production d’énergie électrique semble être une solution écologiquement appropriée au problème créé par la demande croissante d’électricité. Son coût fiscal peut cependant rendre irréalisable son adoption dans un court délai, spécialement si son imposition l’affecte de manière irrationnelle. Dans le cas de l’ICMS brésilien, c’était précisément cela qui allait – et c’est encore le cas pour certains États brésiliens – arriver. L’exigence de l’impôt sur l’énergie électrique consommée et sur l’énergie électrique produite, en double; et pas uniquement sur le solde dû du compte courant établi entre le consommateur et le concessionnaire de distribution d’énergie électrique, ôtait tout avantage que représentait l’acquisition d’équipements encore très onéreux et destinés à cet effet. La concession d’exonération fiscale, chose qui commence à être réalisée par certains États de la République fédérative du Brésil, est une solution possible, bien qu’elle ne soit pas la plus appropriée. En plus du fait d’exiger une édition de la loi pour chacune des unités fédératives brésiliennes, elle implique une casuistique qui ne fait qu’augmenter la complexité de la législation, en dédaignant en outre le principe de non-cumul fiscal. Il serait plus approprié que les pouvoirs publics n’utilisent plus d’argument d’ordre environnemental à peine pour des fins rhétoriques destinées à justifier des augmentations de charge fiscale (par exemple, avec la création de taxes devant être acquittées par les pollueurs), ajustant la législation fiscale et son application par les autorités fiscales à des buts effectivement en lien avec la protection de l’environnement.
Mots-Clés: micro-production d’énergie électrique, taxe à la consommation, exonération fiscale.
Abstract
The micro-generation of electric energy seems to be an ecologically appropriate solution to the problem created by the increasing demand for electricity. Its fiscal cost may, however, make its adoption impracticable in a short time, especially if affected by an irrational taxation. In the case of the Brazilian ICMS, it is precisely what happened – and it is still happening in some Brazilian states. States charge the tax on the electrical energy consumed and on the electrical energy produced, in duplicate; and not only on the current account balance established between the consumer and the electric power distribution company. This neutralizes any advantage of acquiring the equipment which generates electricity from solar energy. Tax exemption, which is starting to be granted by some Brazilian States, is a possible solution, although it is not the most appropriate. In addition to requiring an edition of a new legislative act for each of the Brazilian states, it implies a casuistry that only increases the complexity of the legislation, disdaining further the principle of “value added” tax. It would be more appropriate for the public authorities to no longer use environmental arguments for rhetorical purposes intended to justify increases in the tax burden (for example, with the creation of taxes to be paid by polluters), adjusting the tax legislation and its application by the tax authorities for purposes effectively related to the protection of the environment.
Keywords: micro-production of electrical energy, consumption tax, tax exemption.
1. Introduction
On sait que l’impôt n’est jamais totalement neutre, puisqu’il représente une charge dans l’exercice des activités ou des conduites sur lesquelles il est appliqué. Il s’agit du “double dividende” de la fiscalité, capable de fonctionner autant comme instrument de financement des dépenses publiques que comme induction de comportements. Connaître ces effets est important, non seulement pour attribuer éventuellement à la contribution, de manière délibérée, une fonction extra-fiscale, mais principalement pour éviter que celle-ci, sans que cela soit explicitement désiré, ait pour effet de décourager des comportements qui devraient être encouragés.
En ce qui concerne la protection de l’environnement, l’un des principaux problèmes des activités polluantes réside dans le fait que, en général, elles ont un prix moins élevé, ou génèrent moins de coûts pour ceux qui les réalisent. Le principal fardeau qui en découle, d’ordre environnemental, est porté par toute la société, et pas seulement par les bénéficiaires des moindres coûts économiques, et par conséquent, du plus grand retour d’investissement obtenu grâce à l’activité; une anomalie du marché que les économistes nomment externalité négative1. D’où l’importance de connaître les effets inductifs de la fiscalité sur les activités économiques, dans le but d’encourager celles qui sont saines d’un point de vue environnemental, ou pour le moins, afin de ne pas les décourager, car il est certain que l’effet inductif de la fiscalité peut être beaucoup plus efficace que ne le seraient des impositions sévères de normes de sanctions d’ordre environnemental2.
Au Brésil, la forme suivant laquelle les préoccupations environnementales influencent l’élaboration, l’interprétation et l’application des normes du droit fiscal est encore très lente. Lorsque l’on a l’intention d’augmenter les charges, par plus d’impôts, pour ceux qui éventuellement polluent le plus, une convergence entre des intérêts de perception d’impôts et des intérêts environnementaux apparaît, ce qui peut même conduire les autorités des finances publiques à avoir le même intérêt dans l’utilisation extra-fiscale de l’impôt. Mais, lorsqu’il s’agit de diminuer les charges de ceux qui réalisent des activités écologiquement saines, en réduisant les coûts qui sont habituellement alloués à la majorité des contribuables, le conflit entre l’intérêt lié à la collecte d’impôts et les objectifs liés à la protection environnementale peut avoir pour conséquence le fait que l’impôt ne soit plus utilisé comme instrument d’induction de comportements plus appropriés. Ou pire encore: l’impôt peut même arriver à décourager des actions qui seraient écologiquement intéressantes.
Lorsque l’on examine ce que l’on appelle la micro-production d’énergie électrique au Brésil, on observe un exemple de situation dans laquelle, peut-être, le conflit en question entre des intérêts de collecte d’impôts et la protection environnementale conduit à une utilisation erronée de la fiscalité, qui se transforme en obstacle à un changement de comportement dans la société qui serait en tout profitable à l’environnement. Il faut examiner si cela arrive effectivement, et de quelle manière, afin de trouver, dans une approche plus ample sur la question environnementale et sur la collecte des impôts, une solution plus adéquate, conciliatrice des différents intérêts, lesquels, au sens strict et à long terme, ne doivent, ni ne sont obligés de s’opposer.
2. Micro-production d’énergie électrique. Concept et importance
Dans nos sociétés contemporaines, on sait que l’énergie électrique est l’un des biens parmi les plus essentiels, indispensable à la pratique de diverses activités qui dépendent du fonctionnement de machines, d’appareils, de lampes, de systèmes électroniques, etc. L’interconnexion naturelle des actions et des dispositifs humains, qui permettent la construction de nouvelles réalités, d’objets ou de fonctions à partir du préexistant, fait que le caractère essentiel, et avec lui, la dépendance envers l’énergie électrique, sont chaque jour de plus en plus importants.
De fait, les ordinateurs ne sont déjà plus utilisés individuellement, mais sont connectés en réseau, transmettant des messages, des archives, des images, des documents, des actes de procédure, des résultats d’examens médicaux ou même d’élections à d’importantes fonctions politiques. Des lumières illuminent l’obscurité et orientent la circulation. Bref, il n’est pas nécessaire de démontrer ici la croissante utilisation de l’énergie électrique dans les sociétés contemporaines, et le chaos qui résulterait de son absence.
L’utilisation croissante de l’énergie électrique a donc pour conséquence une augmentation de la demande nécessaire à sa production, forçant les sociétés humaines à construire des infrastructures destinées à la produire, soit à partir de la combustion de combustibles fossiles, de la fission nucléaire, de l’utilisation de la force des eaux, de la lumière solaire, des vents, etc.
Le problème réside dans le fait que les technologies de production d’énergie électrique les plus répandues actuellement ont un impact environnemental significatif. La combustion de combustibles fossiles, par exemple, conduit à une émission de carbone dans l’atmosphère, ce qui contribue à l’accroissement de l’effet de serre et, à cause de cela, au réchauffement climatique global. La fission nucléaire, même si elle semble propre dans des situations normales, peut s’avérer catastrophique en cas d’accident éventuel ou de fuite, comme le montrent les exemples de Fukushima et de Tchernobyl. Même la production au moyen d’usines hydroélectriques a un impact environnemental significatif, vu que de grands domaines de terres sont noyés à cause de la construction des barrages nécessaires pour que la force de l’eau des fleuves puisse produire de l’énergie, créant des préjudices environnementaux significatifs.
Et même les technologies écologiquement plus propres, comme celles utilisant la lumière solaire ou la force des vents, demandent une grande étendue de terres sur lesquelles les générateurs ou les plaques pourront être installés, pouvant faire penser, surtout dans le cas des éoliennes, à une pollution visuelle quand elles sont installées en grande quantité sur certaines régions côtières.
Après avoir considéré ces questions, il y a aussi le problème lié au fait que, quand l’énergie est produite dans une région donnée du territoire, il faut la transporter vers les centres où sa consommation sera réalisée. Lors de ce transport, en dehors des coûts économiques et environnementaux qui lui sont associés, étant donné que les lignes à haute tension doivent passer par de longues étendues de terres, il y aura des pertes, naturelles et inévitables. Finalement, de possibles problèmes sur les lignes de transmission, ou à l’usine de production d’énergie électrique, peuvent laisser une région entière sans approvisionnement, d’où l’importance de diversifier le réseau de production énergétique, pour que l’on ne dépende plus uniquement d’une seule modalité de production.
Ces facteurs rendent largement avantageux, sous l’angle de la protection de l’environnement, le fait que l’on diffuse l’utilisation de technologies de micro-génération propre d’énergie électrique, comprise comme étant celle produite par une centrale d’une puissance installée inférieure ou égale à 75 kW, utilisant une cogénération qualifiée ou bien des sources renouvelables d’énergie électrique, connectée à un réseau de distribution au travers d’installations d’unités consommatrices3.
Dans cet ordre d’idées, en outre de grandes usines génératrices d’énergie électrique, connectées aux localités consommatrices à travers de longues lignes de transmission, les propres consommateurs pourront compter, dans leurs propres domiciles ou établissements commerciaux, sur de petits producteurs d’énergie. On établit, de cette façon, un système bénéfique pour tous, puisque d’un côté, on réduit la demande pour plus de production d’énergie de façon écologiquement moins conseillée, mais d’un autre côté, les propriétaires des unités micro-génératrices peuvent être bénéficiés par le réseau de distribution, sur lequel ils peuvent compter en cas d’insuffisance de leur propre micro-production. Pour compléter le cadre de la coopération, dans le cas où l’électricité générée serait supérieure à celle consommée dans une unité micro-génératrice déterminée, comme il n’existe pas de technologie viable pour le stockage de l’électricité excédentaire, son excédent serait transféré vers le réseau public, pouvant être consommé par d’autres utilisateurs.
Il se crée, ainsi, un compte courant entre le titulaire de l’unité micro-productrice et l’entreprise concessionnaire du service public chargée de la distribution d’énergie électrique. Lorsque l’électricité générée est inférieure à celle consommée dans sa résidence ou son commerce, la quantité nécessaire est retirée du réseau public, mais lorsque l’énergie produite par le micro-producteur est supérieure à celle consommée, l’excédent est transféré vers le réseau public, incombant à l’utilisateur-consommateur, à la fin de chaque mois, de payer à l’entreprise concessionnaire la valeur correspondant à la différence, autrement dit, au solde impayé du compte courant. Au cas où il y aurait un solde créditeur, celui-ci peut être accumulé pour la période suivante, pouvant être utilisé pendant les 60 (soixante) mois subséquents dans la même unité consommatrice, ou dans d’autres dont la propriété est de la même personne physique ou juridique (Resolutions Normatives 687/2015 et 482/2012 de l’ANEEL).
Dans le cas du Nordeste brésilien, où le soleil brille pratiquement tous les jours de l’année, avec un climat semblable à celui de l’été en Europe, c’est un grand gâchis que de ne pas profiter du potentiel de l’énergie solaire, l’utilisation d’énergies polluantes étant un contresens, comme celles liées aux usines thermoélectriques fonctionnant au charbon ou au pétrole, lorsque l’on peut profiter d’une énergie propre et, dans cette partie du globe, disponible presque toute l’année.
Pour que la micro-production se diffuse, elle se doit, néanmoins, d’être économiquement viable. Même si elles sont de moins en moins chères, les technologies de micro-production, principalement celles qui ne polluent pas, comme celles liées à l’énergie solaire, restent encore prohibitives. Un aspect attractif réside dans la propre économie réalisée vis-à-vis de l’énergie électrique consommée issue du réseau public; une incitation qui est d’autant plus grande si l’on permet au consommateur, comme c’est le cas au Brésil, de transférer l’excédent éventuellement produit durant certaines périodes vers le réseau public, afin de bénéficier d’un crédit auprès du concessionnaire pouvant être déduit sur l’énergie électrique consommée directement de ce dernier dans des périodes de moindre production (par exemple, durant la nuit, dans le cas de l’énergie solaire).
C’est dans ce contexte que l’imposition, ainsi que les coûts qu’elle représente, mérite désormais l’attention de ceux qui se penchent sur le sujet. En dehors du coût fiscal appliqué sur de tels biens, nécessaires à la micro-production de l’énergie, soit au moment de sa production, soit lors de son importation et de sa commercialisation, lequel doit être évalué et comparé au coût de la production de l’énergie électrique non-propre (afin que l’impôt ne finisse pas par fonctionner comme un véhicule inducteur de comportements polluants)4, il faut être attentif à la propre fiscalité de l’approvisionnement en électricité, et de sa micro-production.
3. La micro-production d’énergie électrique et l’imposition par l’ICMS
Dans le cas du Brésil, l’approvisionnement en électricité est taxé par l’impôt sur les opérations relatives à la circulation de marchandises et sur les services de communication et de transports interrégionaux et intercommunaux (ICMS). À des fins d’incidence de l’impôt, on considère que l’énergie électrique est une marchandise, et que sa transmission et sa commercialisation sont soumises à l’impôt, qui est de la compétence des États de la République fédérative du Brésil et du District fédéral. La forme de calcul et de recouvrement de l’ICMS obéit au principe du non-cumul, ce qui le rapproche de l’impôt sur la valeur ajoutée (IVA)/la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) collecté(e) dans les pays intégrant l’Union européenne.
Le problème réside dans le fait que, bien que l’utilisation de la micro-production d’énergie électrique au Brésil ait débuté timidement, les autorités fiscales pensent désormais que l’impôt (l’ICMS) doit être dû sur l’énergie produite par les micro-producteurs, aussi bien que sur l’énergie consommée à partir du réseau public par le domicile ou le commerce où se situe le micro-générateur, pendant les périodes de moindre production. Pour en donner un exemple, si à un mois déterminé, une résidence ayant un micro-générateur installé produit 1.000 Kwh, mais consomme 1.500 Kwh, payant ainsi à l’entreprise concessionnaire du service de distribution d’énergie électrique la consommation des 500 Kwh excédentaires à sa production propre, l’État ne réclame pas seulement l’ICMS sur la valeur payée correspondant aux 500 Kwh, mais sur la valeur correspondant à 2.500 Kwh.
On perçoit clairement qu’avec cela, les États de la fédération brésilienne utilisent l’impôt pour décourager et même dissuader ce comportement écologiquement approprié que représente l’utilisation d’unités micro-génératrices d’énergie électrique. Cela montre que la fiscalité environnementale détient peut-être plus d’espace dans les cas où l’État utilise la finalité environnementale comme justification pour exiger plus d’impôts que ceux ordinairement exigés, servant de prétexte légitimant une augmentation de charges dans le cadre de ce que l’on nomme les “impôts verts” (suivant le principe du pollueur-payeur). Quand le respect de l’environnement impose l’adoption de compréhensions ou d’interprétations qui impliquent éventuellement l’exigence d’une moindre quantité d’impôts, c’est l’intérêt collecteur, et non la protection de l’environnement, qui semble de fait l’emporter. Quelque chose d’assez semblable a eu lieu par rapport à l’industrie du recyclage, laquelle, dans un premier temps, comme conséquence d’une interprétation étriquée de la législation, a souffert de coûts d’imposition supérieurs à ceux appliqués sur les industries qui produisaient des matériaux analogues en utilisant des matières premières extraites de la nature (par exemple, papier, aluminium, etc.). Il s’agit, cependant, d’une posture erronée, non seulement parce que la Constitution brésilienne impose un traitement fiscal différencié aux activités ou produits écologiquement corrects (article 170, alinéa VI), mais aussi parce que la protection de l’environnement représente un objectif aussi important, voire plus, que les autres, devant être atteint par l’utilisation des ressources collectées. En outre, même d’un point de vue juridique purement formel, la compréhension adoptée par les administrations financières brésiliennes des États de la fédération ne semble point être des plus judicieux, par sa négligence envers les principes et les objectifs devant être optimisés par la fiscalité.
4. L’exonération comme solution législative et la question du non-cumul
Pour résoudre le problème généré par les autorités fiscales des États brésiliens, qui tendait à entraver l’utilisation de la micro-génération d’énergie électrique au Brésil, beaucoup d’États de la République fédérative du Brésil ont commencé à accorder une exonération d’ICMS sur les opérations liées à l’approvisionnement de l’énergie ainsi générée. Grâce à cela, la contribution de l’impôt d’État en question n’a plus représenté un coût supplémentaire pesant sur ceux qui utilisent la micro-génération d’énergie électrique, la rendant désormais plus attrayante.
Cependant, le problème de cette solution est que l’impôt dont on parle est de la compétence des États de la République fédérative. Cela implique que chacun des 26 États qui composent la République fédérative du Brésil, en outre du District Fédéral, a le devoir de prendre l’initiative politique d’approuver une loi qui exonère fiscalement les opérations en question. En outre, la solution intensifie la casuistique, et à l’avenir, au cas où surgiraient de nouvelles formes de production et de commercialisation d’énergie électrique, celles-ci seraient certainement imposées de nouveau de manière inappropriée, sous le prétexte qu’elles ne seraient pas expressément prévues dans la loi concessionnelle de l’exonération d’impôts5.
En vérité, si l’on considère que l’impôt est non-cumulatif, la prétention qu’ont les États brésiliens de taxer la micro-production d’énergie apparaît déjà comme étant inconstitutionnelle, devant être abandonnée par les administrations fiscales des États, indépendamment de l’édition de lois d’exonérations. Réellement, en imposant l’électricité générée par chaque unité consommatrice au moyen de l’ICMS, indépendamment du fait qu’elle soit ou non consommée dans la propre unité, ou transférée vers le réseau de distribution électrique, l’État viole des aspects essentiels à la propre structure de l’impôt.
Dès le début, on s’aperçoit que l’énergie produite et consommée par le propre propriétaire de l’unité micro-génératrice, et qui n’est pas transférée vers le réseau public de distribution d’énergie, ne fait même pas l’objet d’une opération relative à la circulation de marchandises, fait qui génère l’impôt. Cela équivaut, dans ce cas, à la situation d’une personne qui possède un potager bio dans son jardin, et qui produit les salades et les légumes qu’il consomme dans sa propre cuisine. Il n’y a pas d’achat, de vente, ou un quelconque commerce avec des “marchandises”; dans cette hypothèse de production pour sa propre consommation, le fait de penser à l’exigence d’un impôt est, de toute façon, absurde. En ce qui concerne l’énergie électrique produite pour soi et consommée dans son propre établissement commercial, il s’agit donc de l’hypothèse de non-incidence de l’impôt, du fait de l’absence de circulation, c’est-à-dire de changement de propriétaire.
Mais même pour ce qui a trait à l’énergie électrique excédentaire, que le consommateur produit mais n’utilise pas, et qu’il redistribue vers le réseau public afin d’obtenir des “crédits” pouvant être déduits de l’énergie qu’il consommera lors de périodes de consommation plus importante et de moindre production, l’exigence de l’impôt ne se justifie pas. Il faut rappeler que l’impôt est non-cumulatif, et il doit y avoir déduction, pour chaque opération imposable, de l’impôt affectant des opérations antérieures. Ainsi, si une résidence produit un excédent de 200 Kwh, obtenant ainsi un crédit devant être déduit du paiement de l’énergie consommée à un moment postérieur; il est nécessaire, avant de penser à l’exigence de l’ICMS sur cette opération, de prendre en considération tout l’impôt affectant l’énergie qui lui a été fournie antérieurement par le concessionnaire d’énergie électrique, duquel il aurait droit à un crédit.
Dans cet ordre d’idées, si un domicile consomme “100” d’énergie électrique du réseau de distribution électrique, mais qu’il produit, à des périodes de génération plus importante, un excédent de “40” qui est reversé au réseau électrique, il serait possible de faire payer l’impôt uniquement sur la redistribution des “40”, si l’on assurait au consommateur/micro-producteur un crédit sur l’impôt affectant les “100” consommés. Il n’y aurait, de cette façon, aucun impôt à exiger, puisque le crédit de l’énergie totale consommée sera toujours plus important, en considérant toutes les périodes, que la dette.
En d’autres termes, les prétentions des États brésiliens ignorent le fait que le consommateur/micro-producteur, lorsqu’il utilise l’énergie du réseau électrique, déjà imposé par l’ICMS, a un crédit qui se réfère à cet impôt préalablement appliqué, devant être déduit de la prétendue dette affectant l’énergie électrique qu’il a produite et fournie ou rendue au réseau de distribution public. De la même manière, l’énergie électrique générée et redistribuée vers le réseau de distribution public, en étant consommée par d’autres personnes, sera encore une fois imposée par l’ICMS. Ainsi, l’imposition de l’énergie électrique “restituée” par l’unité micro-productrice au concessionnaire d’énergie électrique implique de multiples impositions de l’ICMS, de forme cumulative, portant atteinte à ce principe constitutionnel. Si le droit au crédit était respecté, on arriverait au même résultat, c’est-à-dire d’imposer seulement le solde du compte courant entre l’énergie électrique consommée et l’énergie électrique produite, en prenant comme base la valeur de la facture présentée par le concessionnaire de distribution d’énergie électrique au consommateur; évitant, ainsi, la nécessité d’exonération fiscale.
La “restitution” de l’excédent d’énergie électrique micro-générée au réseau électrique public ne peut pas être comparée à une opération relative à la circulation de marchandises, mais en fait, seulement à la restitution d’une partie de l’énergie électrique consommée, qui est fongible et non corporelle. Si bien que l’on garantit seulement un crédit au consommateur, sujet à une déduction sur la propre énergie électrique consommée lors d’autres périodes, dans un délai de 60 mois, mais en aucun cas n’est dû, par le concessionnaire, le paiement monétaire référent à cette quantité d’énergie électrique redistribuée au réseau public. Pour cette raison, aussi, les prétentions des États brésiliens de l’imposer sont injustifiées.
La question mérite ainsi un examen au prisme de la dignité humaine et du rôle de l’État dans la promotion de cette dernière. Pour la Constitution brésilienne, la finalité de la protection environnementale est d’assurer un environnement écologiquement équilibré, dans lequel l’être humain peut se développer dignement dans ses facettes les plus diverses. La protection de l’environnement se présente comme une limitation au pouvoir fiscal, vu qu’une telle protection intègre clairement l’intérêt public primaire. L’intérêt public primaire est tant intégré pour cette finalité que, par exemple, la législation administrative a commencé à consacrer la promotion du développement national durable en tant que valeur juridique contraignante à être considérée par les pouvoirs publics lors de l’acquisition de biens et de services6. Dans ce scénario, les pouvoirs publics “[…] n’appliquent pas l’impôt et ne pourront pas non plus le faire légalement à peine et dans le seul but de s’enrichir”7. De la sorte, il est incohérent qu’une législation fiscale ignore de tels principes et décourage l’individu à trouver, avec sa propre structure, des ressources pour promouvoir l’environnement écologiquement équilibré, au profit de son autonomie et au bénéfice de la société.
Considérations finales
La micro-production d’énergie électrique semble être une solution écologiquement appropriée au problème créé par la demande croissante d’électricité. Problème dont les conséquences pour l’environnement peuvent s’avérer être les pires possibles. Son coût fiscal peut cependant rendre irréalisable son adoption dans un court délai, spécialement si son imposition l’affecte de manière irrationnelle, l’amenant à représenter un coût non seulement égal – ce qui ne serait déjà pas positif –, mais même supérieur à celui affectant d’autres formes non propres de production d’énergie électrique.
Dans le cas de l’ICMS brésilien, c’était précisément cela qui allait – et c’est encore le cas pour certains États brésiliens – arriver. L’exigence de l’impôt sur l’énergie électrique consommée et sur l’énergie électrique produite, en double; et pas uniquement sur le solde dû du compte courant établi entre le consommateur et le concessionnaire de distribution d’énergie électrique, ôtait tout avantage que représentait l’acquisition d’équipements encore très onéreux et destinés à cet effet.
La concession d’exonération fiscale, chose qui commence à être réalisée par certains États de la République fédérative du Brésil, est une solution possible, bien qu’elle ne soit pas la plus appropriée. En plus du fait d’exiger une édition de la loi pour chacune des unités fédératives brésiliennes, elle implique une casuistique qui ne fait qu’augmenter la complexité de la législation, en dédaignant en outre le principe de non-cumul fiscal. Il serait plus approprié que les pouvoirs publics n’utilisent plus d’argument d’ordre environnemental à peine pour des fins rhétoriques destinées à justifier des augmentations de charge fiscale (par exemple, avec la création de taxes devant être acquittées par les pollueurs), ajustant la législation fiscale et son application par les autorités fiscales à des buts effectivement en lien avec la protection de l’environnement.
Références
BIRK, Dieter. Steuerrecht. 7. éd. Heidelberg: C. F. Müller Verlag, 2004.
FIORILLO, Celso Antonio P. Curso de Direito Ambiental brasileiro. 17. ed. São Paulo: Saraiva, 2017.
MANKIW, N. Gregory. Principles of economics. 5. ed. Cincinnati: South-Western College Pub, 2008.
MORGAN, William E.; OLSON, Dennis. Nonneutral features of energy taxation. Natural Resources Journal, v. 20, n. 4, 1980, p. 853-876.
1 MANKIW, N. Gregory. Principles of economics. 5. ed. Cincinnati: South-Western College Pub, 2008, p. 157.
2 BIRK, Dieter. Steuerrecht. 7. éd. Heidelberg: C. F. Müller Verlag, 2004, p. 58.
3 Article 2 de la Résolution Normative de l’ANEEL 482/2012, dont la rédaction en est donnée par la Résolution Normative de l’ANEEL 687/2015. ANEEL est un sigle qui désigne l’Agence Nationale d’Énergie Électrique, entité spéciale du gouvernement Fédéral Brésilien chargé de la régulation du marché de l’énergie électrique.
4 Aux États-Unis, depuis les années 1980, il existe des bénéfices liés à l’impôt sur le revenu pour les contribuables utilisant des technologies alternatives de production d’énergie (MORGAN, William E.; OLSON, Dennis. Nonneutral features of energy taxation. Natural Resources Journal, v. 20, n. 4, 1980, p. 857).
5 Les autorités brésiliennes, dans de telles situations, invoquent fréquemment la nécessité d’avoir des interprétations “littérales” ou restrictives des lois concessionnelles d’exonérations, avec la protection supposée de l’article 111 du CTN (code fiscal national brésilien), qui stipule: “On interprète littéralement la législation fiscale qui décide sur: I – la suspension ou l’exclusion du crédit fiscal; II – l’attribution d’exonération; III – dispense du devoir d’obligations fiscales accessoires”.
6 L’article 3 de la loi 8.666/93 a été altéré par la loi 12.349 de 2010 afin d’inclure l’expression.
7 Traduit par nos soins. FIORILLO, Celso Antonio P. Curso de Direito Ambiental brasileiro. 17. ed. São Paulo: Saraiva, 2017, p. 829.